vendredi 28 décembre 2018

CIEL MATINAL



Pas encore le temps d'écrire, mais ce ciel, qui me semble si chargé d'espoir, je tenais à le partager avec vous !

vendredi 21 décembre 2018

POUR VOUS SOUHAITER UNE BONNE FIN D'ANNEE





Ce beau texte de Rick BASS, tiré  du "Livre de Yaak",  m'a frappée, peut-être parce qu'il décrit pour moi une certaine idée du bonheur.

Que chacun d'entre vous en soit comblé, d'une manière ou d'une autre !

A très bientôt en janvier !


"Nous habitons une minuscule cabane en rondins au bord d'un étang, qui est en fait le bras mort d'une rivière où des castors ont construit un barrage....
Ma cabane possède une grande baie vitrée donnant sur l'étang qui se déploie à  vingt pieds seulement de la fenêtre. Les hérons bleus s'y pavanent au milieu des roseaux, embrochant du bec les genouilles et les truitelles. La mère castor y mènent ses petits tous les matins. Les aigles à tête blanche le survolent, bas dans le ciel, surtout en hiver - leur vol à travers une pluie de neige est d'une beauté inouïe. La femelle de l'élan aime venir s'y poster avec son petit les jours de canicule. Parfois je m'offre une virée en canoë : j'attrape une truite ou deux pour notre dîner, ou je les pêche par simple plaisir avant de les remettre à l'eau. En hiver, les loutres s'ébattent sur la glace, à travers laquelle elles plongent, disparaissent le temps d'une minute, puis ressortent avec un poisson qu'elles partagent en famille, pas le moins du monde incommodées par la température inférieure à moins trente. Un jour d'hiver, une biche a traversé la glace, et j'ai dû me glisser hors de ma cabane, le lasso à la main pour l'aider à s'en sortir.
Au printemps, lorsque les oies et les canards font leur apparition, ailes déployées, palmes en avant pour amerrir au terme d'une longue glissade, on croirait qu'ils vont poursuivre leur vol plané et traverser notre fenêtre. Et pendant les longs crépuscules d'été les chauve-souris se pressent au-dessus de l'étang, happant les insectes, à la surface de l'eau."


vendredi 14 décembre 2018

ROGER II DE SICILE






Auteur : PIERRE AUBE
Editions : Perrin -2016 - 515 pages

Autant vous le dire tout de suite : je suis épuisée. Depuis quinze jours, au milieu des cadeaux à emballer, des listes de courses à établir, des premiers "bredele"* à confectionner, etc, etc, je caracole entre le XIe et le XIIe siècle, au milieu des chevaliers normands, aux prénoms plus romantiques les uns que les autres - Tancrède (mon préféré), Bohémond, Guillaume, Drogon, Onfroi - entre sud de l'Italie, Sicile, côte africaine, et Orient.
Tout cela pour en apprendre plus, ou plutôt tout découvrir, sur celui dont le prénom ne fait plus rêver personne : Roger II de Sicile (1095-1154).

Tout a commencé par un reportage d'Arte, sur la chapelle palatine de Palerme : un grand éblouissement et un grand étonnement devant l'extraordinaire beauté de ce monument et la vie évoquée de ce souverain, qui semblait, tout en restant chrétien, avoir su respecter l'ensemble de ses sujets, qu'il soient chrétiens, mais grecs, juifs ou, pour les plus nombreux, musulmans.
Comme c'est sa propre mère,  la grande Adelaïde qui vantait ses mérites, j'ai pensé qu'il valait mieux chercher une autre source avant de statuer définitivement sur son compte.


Chapelle Palatine de Palerme consacrée en avril 1140.

Pour tout dire rien n'est simple et tout commence un peu plus d'une génération avant la naissance de Roger II, "de très modeste façon. Presque subreptice."
Quelques chevaliers normands, souvent les puînés de familles nobles établies dans notre actuelle Normandie descendent vers le sud de l'Italie, aux alentours de l'an mille.
Sont-ils venus pour lutter contre les "incroyants" si bien implantés en Sicile ? Sont-ils venus pour se louer en tant que mercenaires ? Sont-ils venus pour s'octroyer des terres ?  Nul n'en a plus vraiment le souvenir. Ce qui est certain c'est qu'ils sont détestés :
"Des brigands sans excès de scrupules", "plus atroces que les grecs, plus féroces que les sarrasins".

Parmi eux, les fils de Tancrède de Hauteville, obscur baron du Cotentin, nés de deux lits différents.
Autant par l'épée que par alliances ceux de Murielle - Guillaume, Drogon, Onfroi - deviendront successivement comtes de Pouille, tandis que ceux de Frésende, - Robert Guiscard  et son cadet Roger Ier dit "Le grand Comte" -  se pareront bientôt des titres de duc de Pouille pour le premier  et de comte de Sicile et de Calabre pour le plus jeune.
Roger II, fils de ce dernier, saura ensuite réunir les deux héritages, et jouant des conflits qui à la même époque déchirent la papauté, comme les terres au nord et au sud de son domaine terrestre, n'aura plus qu'à se faire couronner roi de Sicile et étendre son influence vers l'Orient et sur la côte de cette Ifrîqiyya si longuement convoitée.


Le couronnement du roi Roger... par le Christ.
Eglise de la Martorana. Palerme. Sicile.

Enfin "n'aura plus", c'est aller un peu vite en besogne.
De fait, durant des décennies, il lui faudra lutter dans le pied de la botte, contre les barons, souvent des très proches, les villes  jalouses de leurs libertés, les évêques et autres soutiens des papes qui se succèdent où règnent en même temps.
C'est une vie de guerrier, jamais en repos ou presque, juste quelques mois l'hiver dans sa bien-aimée Sicile.
Il lui faudra également surveiller les ambitions des uns et des autres à Constantinople, Venise, Jérusalem,  tacher de réparer l'affront fait jadis à sa mère.
Il lui  faudra se montrer sans pitié - il ne recule pas devant massacres et pillages - mais aussi savoir abaisser les vaincus, mais parfois  pas trop, savoir récompenser les fidèles tout en leur tenant la bride.
Il lui faudra savoir légiférer, chercher à toujours en savoir plus sur le monde qui l'entoure, mais aussi aux yeux du monde proclamer la gloire de Dieu et la sienne propre, sur  et entre les murs des cathédrales et chapelles qu'il laissera derrière lui, tout en respectant la foi des autres.



La carte du monde, dite "Le livre du roi Roger",, dressée par Al Idrîssî, à la demande de Roger II de Sicile.

C'est donc bien un homme  complexe et passionnant que ce roi-là et les historiens ne s'y sont pas trompés  :

  "Homme d'une disponibilité d'esprit illimitée, d'une hardiesse sans égale", doté d'"un sens aigu du possible et des compromis indispensables pour pouvoir atteindre l'essentiel, d'"une curiosité intellectuelle sans préjugés",  d'"un penchant certain pour la majesté et la magnificence"**

C'est un livre tout aussi complexe et passionnant que celui-ci, érudit sans être pédant, bien écrit, ne manquant pas d'humour, que j'ai quitté, remplie d'admiration pour celui qui en était le sujet, comme pour son auteur capable de rendre claire ou presque, une succession d'évènements et de  personnages, qui sous une autre plume, serait restée inextricable.


Chapelle palatine de Palerme. La Genèse sous les incroyables plafonds réalisés par des artistes musulmans.

* petits gâteaux de Noël alsaciens.
** Lucien Musset

samedi 1 décembre 2018

CHEMINS





Auteur : AXEL KAHN
Editions : Stock - 2018 - 281 pages.

Agé aujourd'hui de soixante-quatorze ans, Axel KAHN, qui fut et/ou est encore, médecin, généticien, directeur de recherche à l'INSERM, directeur de l'Institut Cochin, président de l'université Paris-Descartes, membre du comité national d'Ethique, homme politique (ouf !)...
a choisi, dans ce qui se révèle être une  biographie privée, de se définir avant tout comme  un marcheur.
On lui reconnaît bien volontiers ce titre, lorsque l'on sait que selon ses calculs, il a parcouru jusqu'à aujourd'hui,  plus de 100 000 km à pieds, "marathons et autres épreuves sur longue distance" exclus.




C'est donc de ses chemins parcourus qu'il nous parle, des premiers, sur ses jambes d'enfant, dans la campagne de sa Touraine natale, jusqu'aux plus récents, sur ses jambes d'homme âgé, qui continuent à le conduire, après deux traversées en diagonale de la France, au coeur de son terrain de vie favori : la montagne.

Des chemins parfois heureux, comme ceux suivis, petit garçon avec ses parents dans le Jura ou ses chemins amoureux d'homme adulte en compagnie de cette "Elle", dont il ne nous dit pas grand-chose, sinon, en creux, qu'elle reste inoubliée, des chemins parfois malheureux comme ceux de Corse, arpentés après le décès de son père.

Des chemins qui dans tous les cas cependant l'ont mené vers la beauté, le sublime, la liberté ou à l'inverse, vers ce que la vie a de plus quotidien, au coeur de la France, dont il explore  ainsi, les misères et les richesses.




A sa suite, on découvre de quelle façon cet enfant bien cruellement  arraché à cinq ans à tout ce qui était son monde, a réussi un riche parcours d'homme, sans parler de son parcours professionnel dont il ne dit à peu près rien, malgré le divorce de ses parents, la maladie, le "chaos de [sa] vie familiale", les déconvenues politiques....

Un beau parcours de résilience en quelque sorte, dans lequel l'auto-apitoiement n'a jamais sa place
Non, ici on parle de courage, d'exigence, de responsabilité même si "on est loin d'aimer tout ce dont on se reconnaît responsable".
On comprend qu'il lui a fallu toute une vie pour se libérer de l'injonction paternelle, laissée en héritage,  dans des circonstances particulièrement dramatiques,  à être "raisonnable et humain".
Raisonnable, pas toujours, mais c'est certainement mieux ainsi, mais humain, sans aucun doute.




J'ai eu plaisir à lire ce livre qui m'a permis de mieux connaître celui qui l'a écrit, même si parfois je me suis demandée si, après le très bon accueil de ses ouvrages précédents*, ce n'était pas un peu un livre de commande, comme les éditeurs en font souvent et parfois hélas, pour surfer sur le succès d'un auteur, surtout s'il est vieillissant.

Mais qu'importe. La rencontre avec un "honnête homme" n'est jamais à négliger !


* Dont : " Pensées en chemin : ma France des Ardennes au Pays basque" et 
              " Entre deux mers : voyage au bout de soi"

Toutes les photos ont été prises autour du hameau de Dormillouse, dans les Hautes-Alpes, qu'Axel Kahn semble très bien connaître pour l'avoir beaucoup fréquenté.