Titre original : "The custom of the country"
Auteure : EDITH WHARTON
Traduction : Suzanne MAYOUX
Editions : Les Belles Lettres -2018- 562 pages
Ah, comme elle est belle et désirable, Ondine Spragg ! Aussi ondoyante et charmante, que son prénom peut le laisser espérer. Comme elle est volontaire aussi et comme sait bien obtenir tout ce qu'elle désire, habituée qu'elle est à faire plier ceux qui l'entourent, ses parents en tout premier lieu, des "parents-cariatides", qui n'ont existé que pour elle et qui n'ont jamais su rien lui refuser.
Son pouvoir sur eux a su si bien jouer qu'ils sont à présent installés à New-York, non pas dans leur maison, ils n'en ont pas les moyens, mais dans un hôtel assez chic cependant pour faire croire que c'est un choix et non une nécessité. N'y rencontre-t-on pas tous ceux qui comptent ? C'est du moins ce qu'elle espère. Car son projet est simple : réussir.
Réussir, dans ce monde là et à cette époque, cela signifie pour une jeune-femme, faire un beau mariage et pour Ondine, qui est très ambitieuse, faire même un très beau mariage.
Mr and Mrs I.N. Phelps Stokes John Singer Sargent (1856-1925) |
Elle va parfaitement y parvenir, tout au moins aux yeux des autres.
Epouser Ralph Marvell, dont la maison s'ouvre sur Washington Square, c'est pénétrer dans ce que la haute-société new-yorkaise a de meilleur, de plus aristocratique même.
Epouser Ralph Marvell, dont la maison s'ouvre sur Washington Square, c'est pénétrer dans ce que la haute-société new-yorkaise a de meilleur, de plus aristocratique même.
Ralph Marvell a une seule ambition : écrire. Le monde des affaires lui est totalement étranger. Il faut dire qu'il a été élevé ainsi, dans cette oisiveté distinguée, pétrie d'intelligence, de culture et de sensibilité. Il connaît tous les codes, les respecte, mais sait aussi les bousculer - n'est-ce pas justement ce qu'il fait en épousant Ondine ?- tant il est confiant en leur valeur, confiant également en cette jeune épouse si belle mais un peu frustre, qu'il saura guider jusqu'à lui.
Mais il n'a pas compris : pour Ondine, ce qui compte c'est l'argent et ce qu'il procure : toilettes, bijoux, voyages en Europe, dîners, sorties, respectabilité, ou tout au moins ce qui pour elle en tient lieu... Tout ce qui permet de se mettre en scène et de se faire admirer.
Pas exactement ce que lui-même apprécie, promenades solitaires autour de Florence, cieux à admirer d'autant mieux que l'on est deux, partages silencieux devant les beautés du monde. Quant à la respectabilité il en est l'image même.
La chute sera brutale et même plus que cruelle, mais l'histoire n'est pas finie, du moins pour Ondine.
Portrait de Lady Helene Vincent, vicomtesse d'Abernan
John Singer Sargent (1856-1925)
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Très vite, elle se met en chasse de nouvelles proies : les unes s'échapperont, d'autres succomberont.
Mais elle, ne change pas : toujours belle, toujours incapable de comprendre les valeurs des autres, toujours imperméable à la ruine et aux malheurs qu'elle sème autour d'elle avec une totale insensibilité, elle continue à avancer ou plutôt à boucler la boucle, en devenant ce qu'elle n'a jamais cessé d'être : une arriviste, toujours insatisfaite.
Mais elle, ne change pas : toujours belle, toujours incapable de comprendre les valeurs des autres, toujours imperméable à la ruine et aux malheurs qu'elle sème autour d'elle avec une totale insensibilité, elle continue à avancer ou plutôt à boucler la boucle, en devenant ce qu'elle n'a jamais cessé d'être : une arriviste, toujours insatisfaite.
C'est un livre cruel que celui-ci. Un livre ou la critique n'épargne aucun bord, ni les femmes ni les hommes enchaînés les uns aux autres par "les moeurs de leur pays", décrivant tout à la fois la fin d'un monde et le début du suivant, celui dans lequel nous sommes.
Pour l'écrire il a fallu toute l'expérience d'Edith Wharton, toute son ironie, toute sa lucidité, tout son art de l'écriture, auquel, m'a-t-il semblé la traduction ne rend pas toujours hommage.
Edith Wharton et Henry James étaient amis. En les lisant, on comprend pourquoi.
Je sors de leur lecture toujours emplie de la plus grande admiration.
Une fois de plus je ne saurais trop vous conseiller de ne lire la quatrième de couverture qu'après avoir lu le livre. Celle-ci m'a semblé particulièrement intrusive et, comment-dire, inadaptée quant à sa conclusion ?
J'en ai lu plusieurs de l'auteure, mais pas celui-ci. Tu me donnes envie de replonger dans son univers.
RépondreSupprimerN'hésite-pas. Il y a des auteurs dont on aimerait que la liste des romans soit sans fin. C'est le cas pour moi en ce qui concerne Edith Wharton. Bon dimanche, Aifelle !
SupprimerEt quelle grande dame, un des joyaux de l'histoire littéraire.
RépondreSupprimerJe suis tout à fait de ton avis, Anis. Mon préféré est "Le temps de l'innocence", le premier que j'ai lu d'ailleurs.
SupprimerJ'adore cette romancière. Elle décrit très finement les sentiments et les milieux. Oui, ses livres sont toujours d'une grande cruauté ( le destin de Lily Barth ou de Ethan Frome. J'en ai encore dans ma PAL, mais je note celui-là aussi.
RépondreSupprimerMoi aussi, je commence à avoir lu beaucoup de ses romans, mais espère en trouver d'autres ! De toute façon la relecture ne me fait pas peur, bien que l'on n'ait plus alors le frisson de la découverte.
Supprimerj'en ai lu plusieurs, il y a longtemps;.. Oui, souvent cruel... Mais là je prévois de l ire (enfin!) James, alors tu vois, il ne faut pas me faire changer de chemin. ^_^
RépondreSupprimerDe l'un à l'autre, il n'y a qu'un pas...
Supprimeril est dans ma pile en attente et je me réjouis à l'avance, Edith Wharton peut être très très cruelle, il y a de la cruauté dans le temps de l'innocence, dans Ethan From et plus encore dans Chez les heureux du monde, effectivement ce n'est pas pour rien qu'elle était amie d'H James qui n'a pas non plus l'amour très tendre !
RépondreSupprimerJe te comprends Dominique ! Il ya de la cruauté mais aussi quelque chose de tendre (?), qui me bouleverse toujours. C'est le cas ici pour le personnage de Ralph Marvell, le "premier" mari d'Ondine, dont elle ne cache pas les faiblesses, mais semble les excuser en même temps, je pense parce qu'elle connaît parfaitement ce milieu, et que bien que critique, elle en partage également les codes, peut-être surannés, mais cependant chargés de belles valeurs.
SupprimerIl y a longtemps que je n'ai plus rien lu d'elle et, bizarre, je ne trouve aucun titre de Wharton dans ma bibliothèque ! Je ne me souviens pas d'avoir lu celui-ci, dont cette traduction t'a déçue ?
RépondreSupprimerOui, pas de manière globale, mais sur certaines tournures que j'ai trouvé très confuses, alors que la confusion, ne me semble pas être un trait dominant du style d'Edith Wharton. Quand je butte ainsi sur une phrase, même à la relecture , je pense qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Rien de très grave, mais parfois gênant.
SupprimerIl y a une vingtaine d'années, j'ai connu une vrai folie pour Edith Wharton. J'avais acheté aussi ce roman, à l'époque en 10/18, mais je ne me souviens plus l'avoir lu. Il va falloir que je fouille sur mes étagère.
RépondreSupprimerN'hésitez-pas à faire cette recherche ! Même si vous l'avez déjà lu, une relecture ne sera pas de trop ...
SupprimerLes tableaux que tu as choisis de Sargent (je me souviens avoir vu le premier à à New York) illustre bien ce milieu social. J'ai lu Le temps de l'innocence. Wharton est un très bon peintre de l'âme humaine.
RépondreSupprimerPour les choisir, j'en ai visionné beaucoup et cela a été un régal. Sargent a certainement inspiré le personnage de Popple dans cet ouvrage.
SupprimerJ'ai toujours beaucoup aimé les romans d'Edith Wharton. A un moment donné, je les ai tous lus à la suite. Il faudrait que je les reprenne, d'ailleurs. Ses descriptions de la société américaine étaient d'une grande lucidité, d'une grande précision. Elle semblait bien connaître l'âme humaine et tout ce qu'elle peut avoir de noirceur.
RépondreSupprimerBon dimanche.
Merci à vous ! Moi aussi quand je découvre un auteur et que je l'apprécie, j'ai tendance à tout lire à la suite. Cela a été en partie le cas pour Edith Wharton, mais pour ce livre-ci, c'est un récent "Monde des livres" qui a attiré mon attention. Oui c'est un regard aiguisé qu'elle porte sur l'Amérique, l'Europe aussi, notamment ici et sur l'âme humaine. Du grand art !
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RépondreSupprimerHa là là, vilaine tentatrice, comment vais-je faire? Tant de livres en espagnol m'attendant déjà. Mais,je le note et un tout grand merci.
RépondreSupprimerEn regardant tes magnifiques illustrations, j'ai pensé aux toilettes de Portrait de femmes(certaines sont américaines) de James que tu mentionnes que je suis en train de terminer. Il doit y avoir des parallèles possibles à faire je suppose. Je le note deux fois alors:-))
Oui beaucoup ! Parallèles entre Sargent et le peintre qui est l'un des personnages du livre, qui immortalise "la bonne société" new-yorkaise, parallèles également entre les héroïnes d'Edith Wharton et celles d'Henry James. Quoi qu'il en soit, dans les deux cas, je me régale !
SupprimerUne quatrième de couverture qui spoile, honte ! Merci de l'avertissement. J'ai parfois des appréhensions à lire le résumé éditeur en entier pour cette raison.
RépondreSupprimerNon seulement qui spoile, mais qui le fait mal (à mon humble avis) ! Alors ...
RépondreSupprimerAprès James, je pense attaquer Wharton, enfin ce sera peut être une deuxième époque Wharton pour moi. Et figure to i que je viens d'emprunter à la bibli The custom of the country, qui m'a l'air d'être tout à fait Les beaux mariages! Affaire à suivre;..
RépondreSupprimerOui c'est tout à fait le cas ! J'aime énormément les livres d'Edith Wharton, mon préféré étant "Le temps de l'innocence". Pour avoir le coeur brisé, c'est magique !
RépondreSupprimerJ'en ai lu plusieurs il ya longtemps et j'en suis sortie aussi avec l'impression de cruauté, y compris pour la pauvre lectrice qui aime les fins satisfaisantes. Maintenant je m'attache à autre chose dans un roman et là je me régale avec cette Ondine...(j'en suis au tiers, quand elle rate l'anniversaire de son gosse- oui, elle fait fort!)
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