Titre original : "The House of the Seven Gables"
Auteur : Nathaniel HAWTHORNE
Traduction : Claude IMBERT revue par Marie ELVEN
Introduction, notes, chronologie et bibliographie : Anne BATTESTI
Editions : GF- Flammarion- N°185- 1994
Format : Poche 334 pages
Jusqu'à très récemment, je ne connaissais d'Hawthorne que son portrait le plus célèbre,
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Portrait par Charles OSGOOD -1840
Peabody Essex Museum - Salem MA- USA
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ainsi que cette phrase, plus que flatteuse, prononcée par une passante en le croisant :
"Etes-vous un homme ou bien un ange ?"
Mais après avoir découvert Concord, puis Salem où l'on peut visiter la demeure de sa cousine -cadre de son roman-, ainsi que sa maison natale, beaucoup plus modeste, rebâtie à côté, je n'avais plus qu'une envie : découvrir son oeuvre.
Nathaniel HAWTHORNE a quarante-sept ans lorsqu'il publie, en 1851 "La maison aux sept pignons".
Depuis 26 ans, il a ajouté à son nom -Hathorne- ce W qui lui permet d'échapper à la honte d'être le descendant de John Hathorne, un des juges des procès en sorcellerie de Salem, en 1692.
Depuis douze ans il a quitté la maison de sa mère dans laquelle, jeune-homme, il s'est cloîtré de très longues années, vivant dans une solitude quasi totale, ne sortant que la nuit, victime d'une profonde dépression :
"Je m'assis au bord du chemin de la vie, comme victime d'un enchantement, et autour de moi surgirent des buissons, qui devinrent des arbres, puis une épaisse forêt, jusqu'à fermer toute issue tant étaient inextricables les profondeurs de mon obscurité".
Depuis neuf ans il est l'heureux époux de Sophia PEABODY, qui lui a permis "de rompre un charme fatal au profit d'un autre enchantement".
Depuis un an enfin, il a quitté Salem, "ce pays des nuées" et après la publication de "La lettre écarlate", connaît le succès littéraire qu'il a tant attendu.
Et pourtant, en écrivant "La maison aux sept pignons" c'est à Salem et à sa sombre histoire "familiale et locale", qu'il revient. Il le fait en quelque sorte en cachette, baptisant son roman "romance" un "récit qui n'aurait pas à soutenir l'épreuve des réalités du moment".
Dans la maison aux sept pignons, aujourd'hui bien délabrée, vit Hepzibah Pyncheon, une des rares descendantes de la lignée Pyncheon. Son ancêtre a donné à la maison toute son ampleur actuelle, après s'être approprié le terrain, dont il a fait condamner le légitime propriétaire. Celui-ci en mourant l'a maudit, ainsi que sa descendance, lui promettant que "Dieu lui ferait boire du sang".
Rien ne va plus pour elle : ruinée, elle doit ouvrir une boutique pour survivre, elle l'aristocrate. Sa vie va être heureusement bouleversée par l'arrivée inattendue de sa jeune cousine Phoebe et le retour d'un mystérieux et très aimé visiteur. Tout pourrait être parfait, si son autre cousin, le riche juge Pyncheon, digne descendant de l'ancêtre maudit, ne se manifestait à nouveau.
Autant le dire, peu portée que je suis sur la littérature fantastique, je craignais un peu cette lecture !
En fait je l'ai aimée de bout en bout : un très beau style, des descriptions précises et sensibles, des portraits vivants où la tendresse affleure souvent, de l'humour autant que de la colère, de courtes échappées historiques qui éclairent la construction de ce Nouveau Monde- l'Amérique d'après la révolution-, une analyse ironique du fonctionnement de la société, des commentaires pleins de sagesse : voilà tout ce que l'on trouve dans cette "romance", bien proche du passé et du présent de son auteur.
J'ai rarement été prise sous le charme d'un livre de cette façon. Je l'ai lu avec voracité, souriant à une fin bien sûr convenue, mais qui témoigne aussi du long chemin d'Hawthorne vers la vie et le bonheur.
"Prenez-le pendant qu'il est à portée de la main ! Ne murmurez pas, ne discutez pas, profitez-en !"