mercredi 30 mai 2012

POSTHUMES


Auteure : Nadeije LANEYRIE-DAGEN
avec des dessins de Marc DESGRANDCHAMPS
Editions : Scala 2012, Collection "Ateliers imaginaires"-286 pages-

Voici un livre bien curieux, qui intéresse et déroute à la fois, et qu'il faut lire jusqu'à la dernière page, annexes comprises.

Avec pour auteure, une spécialiste de la Renaissance, on s'attend, si l'on n'a pas prêté attention au titre de la collection,  à un essai, un traité d'histoire de l'art, une monographie.
Mais que penser alors d'une première phrase aussi troublante que celle-ci :
"Qu'il est étrange d'être mort..." 

Un roman alors ? cela semble plus juste une fois constaté que  l'ouvrage est construit sur l'alternance d'un texte, le journal de Francesco Melzi, élève et secrétaire de Léonard de Vinci, et de la voix de celui-ci : un homme mort, qui le sait et ne nie aucunement l'étrangeté du phénomène. 
Mais que font alors ici, ces cartes, cet arbre généalogique des Valois, cette chronologie, ce dictionnaire ?

Il faudra vous y habituer : on est entre les deux. Ce n'est pas la stricte réalité qui importe ici et de toute façon elle est impossible à établir, mais ce qui a pu être.
Ce qui semble vrai est peut-être faux. Ce qui semble faux est peut-être vrai !

Léonard de Vinci- Autoportrait-
Bibliothèque Nationale- Turin, Italie

Suivons donc Léonard de Vinci dans ce dernier voyage qui le conduit à l'automne 1516, de Rome à Amboise, et trois ans plus tard à la mort :  âgé, il a alors soixante-quatre ans , malade, lassé  de voir le pape lui préférer Raphaël, il s'est enfin décidé à répondre à l'invitation de François Ier et quitte son pays, traînant un peu le pas. Il est accompagné de ses plus proches et de huit tableaux.
Parmi eux, la "Sainte-Anne", que Louis XII, père défunt de la reine Claude de France, lui a commandé il y a bien longtemps.
Le voyage se révèle périlleux autant pour Vinci que pour ses oeuvres, la "Sainte-Anne" en particulier.
Il arrive malgré tout à Amboise et s'installe, blessé, au château du Clos -Lucé que le roi a fait préparer pour lui.
Réconforté par l'accueil qui lui est réservé, il espère, malgré ses infirmités, pouvoir se remettre au travail, non pas tant peindre, mais créer une ville, Romorantin, comme le lui a demandé le roi. Il veut également terminer ce tableau, si important pour le reine. Mais rien n'est simple !

Léonard de Vinci-"Sainte-Anne"-
Carton de Burlington House-National Gallery-Londres GB



Léonard de Vinci- Etude de composition pour la "Sainte-Anne"
Gallerie d'ell Accademia-Venise-Italie
Ce n'est donc pas le Léonard flamboyant que nous suivons, mais un vieil homme qui va vers sa mort et doit s'accommoder de ce qui lui est offert : il y a de la tristesse, de la douleur ici et pourtant c'est un livre très vivant et plein de surprises. Je ne parle pas tant des rebondissements, que l'auteure a créés pour nous faire suivre les supposés chemins tortueux de la "Sainte-Anne",  mais de ce que nous pouvons découvrir de la vie de Léonard de Vinci, des secrets de son atelier,  de la cour de France et de ses fastes.
Les personnages sont attachants (quel destin que celui de la reine !), les descriptions vivantes, les techniques passionnantes.
Ceux qui ont eu la chance de pouvoir visiter la récente exposition du Louvre autour du tableau restauré, trouveront ici un moyen bien agréable d'y repenser.
Les autres, seront moins frustrés de ne pas y avoir eu accès...

Léonard de Vinci- "Sainte-Anne"- 
Musée du Louvre. Paris France 
 
J'ai ajouté ces différentes images pour aider à la lecture du livre.
 Regardez-bien,  comparez, tout, paysages et personnages , de la tête aux pieds....

dimanche 27 mai 2012

PLAISIRS DE SAISON

Turin-Italie-
Décidemment, mon oeil doit être en ce moment attiré par le mauve. Comment résister à un tel étal ?
Tout semble si frais, si craquant, si juteux. 
Une seule envie, mettre ses beaux légumes dans mon panier, aller dans ma cuisine et mitonner tout cela. 
Le printemps dans la casserole... 

mercredi 23 mai 2012

VOYAGE D'UN NATURALISTE AUTOUR DU MONDE


Titre original : "The voyage of the Beagle"
Auteur : Charles DARWIN
Traducteur : Edmond Barbier
Editions : La Découverte- poche n° 152- 539 pages


Le 27 décembre 1831, un petit voilier, le "Beagle", quitte le port de Davenport en Angleterre. 
A son bord, le Capitaine Fitz-Roy, soixante seize hommes d'équipage et des passagers : trois natifs de la Terre de Feu "qu'on ramène dans leur pays après les avoir exhibés dans les sociétés géographiques britanniques" et des scientifiques, qui ont pour mission "de compléter l'étude des côtes de la Patagonie et de la terre de Feu,..., de relever les plans des côtes du Chili, du Pérou et de quelques îles du Pacifique - et enfin de faire une série d'observations chronométriques autour du monde.".
Parmi eux, un jeune-homme de vingt-deux ans,  Charles DARWIN, "El naturalista Don Carlos" comme indiqué sur son passeport argentin,  que son père a accepté  de laisser partir pour un périple de cinq années, lassé peut-être de lui voir éviter tout établissement sérieux. 
C'est ce jeune-homme passionné de géologie, de botanique, d'entomologie, de zoologie et qui ne repartira jamais plus en voyage, qui rendra, définitivement, cette expédition célèbre.
Heureusement marié et installé dans le Kent, malgré une mystérieuse maladie qui le rongera toute sa vie et qui est peut-être l'autre conséquence de cette aventure,  il va tirer de cette expérience une oeuvre qui lui assurera la gloire et quelques déboires,  au-delà des cercles scientifiques et de son époque : ce récit tout d'abord, des monographies savantes ensuite,  et plus de vingt ans plus tard, après avoir confronté ses intuitions de jeunesse à la lecture des textes de Malthus et  d'Alfred Wallace, l'ouvrage qui va bouleverser tant de croyances,  "De l'Origine des Espèces".

Mais revenons à notre voyage, puisque c'est de cela qu'il s'agit ici :  
Les îles du Cap-vert pour commencer, trois années passées à explorer les côtes, et pour lui  également l'intérieur de l'Amérique du Sud, quelques mois consacrés aux Galapagos, "Taïti" et la Nouvelle-Zélande, un hiver en Australie, un petit mois dans les "Îles Corail", un printemps à l'île Maurice, quelques semaines à Sainte- Hélène, et enfin le retour en Angleterre le 2 octobre 1836.
A chaque étape le scénario se répète presque à l'identique : à peine débarqué Darwin entreprend  des "excursions " dans les terres. Par "excursions" entendez des voyages pouvant atteindre 640 kilomètres, à cheval ou à pied ou en barque selon le contexte. Il observe :  d'abord le sol, puis les animaux du plus petit au plus grand, les plantes, les hommes et leurs installations aussi. Il regarde un peu goguenard, les révolutions, contemple effrayé les ravages des tremblements de terre, se scandalise du sort réservé aux mineurs et aux esclaves. Il s'étonne, s'interroge, compare, s'informe, ramasse, élève ou dissèque parfois au retour, classe, réfléchit. Puis il repart.

Quoi de plus intéressant qu'un tel voyage en une telle compagnie ? Comment ne pas être passionné de bout en bout par cette description d'un monde qui n'est plus, par l'observation d'un bel esprit en marche ? Par la découverte d'une science qui se construit ?
Vraiment n'hésitez-pas ! Voilà que s'offre à vous, bien assis dans votre fauteuil, loin de la cohue des aéroports, la possibilité de faire un tour du monde sans clichés.
Juste un livre en mains et la boucle sera bouclée. 




     

dimanche 20 mai 2012

BELLES RENCONTRES

La semaine qui vient de s'écouler a été riche en belles rencontres :

La première a été un peu provoquée, car nous avons grimpé avec un certain entêtement pour les apercevoir : mal aux mollets certes, mais une douzaine de bouquetins vaut bien quelques sacrifices.




Deux jours plus tard, la surprise a été totale des deux côtés : on s'est arrêtés, on s'est observés et chacun est prudemment reparti de son côté.



Enfin, avant-hier, alors que nous espérions voir des marmottes, ce sont des papillons qui nous ont éblouis :
Le premier au départ du chemin : un bel inconnu d'un vert renversant.



Le second, au retour, un superbe machaon en guise de comité d'accueil,  dans l'allée du jardin.



Que demander de plus ?

dimanche 13 mai 2012

UN PAS DE CÔTE : LA TULIPE DE GUILLESTRE




Il y a trois semaines, je mettais ce blog en pause, pour cause de départ imminent. 
Je pensais le reprendre dès mon retour, mais les jours ont passé, sans que le goût de lire et d'écrire ne me
reprenne : difficile donc, dans ces conditions, de tenir un blog de lecture !
Que faire alors ? Fermer ?  
Me méfiant des solutions radicales, qui m'éloigneraient de plus de vos amicales visites,  je préfère suivre l'exemple de Françoise Héritier, entendue récemment, et faire un pas de côté  : parler d'autre chose, pour quelques jours peut-être, le temps que l'enthousiasme revienne !

La tulipe de Guillestre donc : c'est une bien belle chose que j'ai eu l'occasion de découvrir mercredi dernier, à moins de vingt minutes de chez moi. 
Pour la trouver, il faut suivre Philippe Gillot, botaniste et administrateur de "la Maison de la Nature" à Guillestre, qui durant les quelques courtes semaines que dure  la floraison, amène, des petits groupes, découvrir la belle sur le seul territoire où elle pousse encore : un petit jardin sauvage, au flanc d'un vallon, la seule station où cette rareté accepte pour l'instant de survivre.

   
L'histoire de cette fleur ressemble un peu à un roman :

Tulipa platystigma Jordan, tel est son nom,  est une endémique de la Haute-Durance, entendez par là, qu'elle ne vit que dans cette zone géographique. Elle fait partie des quatorze espèces de tulipes sauvages encore connues en France et, à ce titre fait l'objet d'une sévère protection.

Découverte et décrite  en 1855 par un naturaliste, Jordan, dont elle porte le nom, elle disparaît presque aussitôt pendant plus d'un siècle.
En 1990,  André Foy, curé de Risoul, contacte Philippe Gillot : depuis plusieurs années, au moment des communions, un bouquet de narcisses blancs est déposé sur l'autel de son église  et, au coeur de ce bouquet, une tulipe, lilas au coeur bleu, attire tous les regards. 


Aussitôt, une véritable enquête est lancée.  Qui apporte ce bouquet ? Où cette fleur est-elle cueillie ? Nos limiers amoureux des fleurs se mettent sur la piste, et bientôt le mystère est résolu : une prairie, ils n'en diront pas plus, un carré fleuri chaque mois de mai, le trésor est là, mais si ténu qu'il faut aller plus loin : négocier avec le propriétaire des lieux, ramasser quelques oignons, les mettre en culture à Gap au Conservatoire botanique de  Charance,  les surveiller pour éviter virose ou hybridation, accepter l' échec, les rapatrier  en 1995 à Guillestre, tout un travail de bénédictin pour arriver vingt ans plus tard à trois planches de fleurs et 13150 oignons.

Rien n'est gagné encore, elle peut encore disparaître : c'est ce qu'elle a pratiquement fait sur son site naturel : trop d'eau ? Pas assez ? trop de vaches autour ? Allez savoir !

En attendant, si vous passez par Guillestre, dans les Hautes- Alpes, la semaine prochaine, contactez "la Maison de la Nature" (04 92 45 37 87). 
Sinon, il vous faudra attendre l'an prochain, en espérant que tout aille bien.