Auteure : Claude-Catherine KIEJMAN
Editions : Tallandier 2012 - 252 pages-
Rassurez-vous, je ne suis pas saisie par le syndrome de "La première dame" et j'attends même avec une certaine impatience le jour où l'on pourra élire un homme ou une femme sans connaître le nom et le visage de celui ou celle qui partage sa vie.
Par contre, en parcourant des magazines américains, j'ai été étonnée de constater à quel point Eleanor Roosevelt était encore présente, notamment par le biais de citations, dont j'ai souvent admiré la pertinence et le courage.
J'avais donc très envie d'en savoir plus.
Source : Time.co |
Entre ces deux photos, toute une vie s'est écoulée.
Une vie commencée dans le plus beau quartier de New-York le 11 octobre 1884 et qui se terminera, soixante-dix-huit ans plus tard, le 7 novembre 1962, dans la même ville.
Entre temps la petite fille craintive qui éprouvait "un très fort désir d'affection et de louange", pour avoir très vite compris que sa mère était rebutée par sa relative disgrâce physique, aura perdu père et mère avant l'âge de dix ans, se sera mariée à vingt-deux ans avec Franklin son beau et brillant cousin, aura donné naissance à six enfants, se sera coulé avec application dans le moule de l'épouse (et de la belle-fille !) soumise, aura aidé son mari, sans faiblir et à l'encontre de ses propres désirs, à gravir les premières marches de son ascension politique.
Puis brutalement, en 1918, tout changera : une trahison, la disparition de plusieurs de ses proches et Eleanore de reconnaître :
" Le monde dans lequel je vivais s'écroula. Je fus pour le première fois, en toute honnêteté face à moi-même, avec mon entourage et mon monde. Cette année -là, je suis vraiment devenue adulte."
Devenir adulte, pour Madame Roosevelt ce sera certes rester la partenaire de son mari dans toute les épreuves, dont en 1921 la terrible attaque de poliomyélite qui transforme cet homme vigoureux en un quasi infirme, comme dans sa montée et son arrivée aux plus hautes fonctions de l'Union, mais ce sera aussi affirmer haut et fort ses propres convictions en défendant les femmes, les enfants et les plus démunis ou en soutenant la marche des Noirs vers les droits civiques. Ce sera également avoir ses propres amitiés voire probablement ses propres amours, ce sera un perpétuel exercice d'équilibre applaudi le plus souvent, mais aussi contesté - elle est pour Hoover "le plus dangereux ennemi du F.B.I."- sans se laisser troubler.
Enfin devenue veuve ce sera endosser des rôles officiels pour son propre compte, se sera notamment défendre les Droits de l'homme, même devant les inquisiteurs staliniens , en leur rappelant, sur un ton "presque maternel" et extrêmement courtois que:
"Nous traitons,..., des droits des peuples, de l'homme, de son droit à être libre. L'homme, ..., c'est cela qui est prioritaire".
C'est donc à un parcours et une personnalité extrêmement riches et complexes que Claude-Catherine Kiejman s'est attaquée. La multitude des sources et à l'inverse le quasi mutisme qu' Eleanore Roosevelt a gardé sur tout ce qui touche à sa vie intime, n'ont pas rendu sa tâche aisée .
En refermant son ouvrage, et comme elle l'indique elle-même en conclusion au préambule de son livre, on se pose toujours la question :
"Qui fut au plus profond d'elle-même Ann Eleanor Roosevelt, née Roosevelt ?"
Pour ma part, j'ai regretté que trop de place soit laissée au contexte, bien sûr intéressant mais qui me semble avoir brouillé les traits et le parcours de celle qui devait être au centre de l'ouvrage.
"Si je peux être utile, je serai ravie d'y aller" déclare-t-elle à son mari qui, en 1942, lui demande, excusez du peu, de visiter les troupe stationnées en Grande-Bretagne et de resserrer les liens entre les Etats-Unis et l'Angleterre.
Etre utile, elle l'a été, à n'en pas douter !