Nous sommes aujourd'hui habitués aux splendides photos de baleines qui nous révèlent tout le mystère, toute la beauté et la puissance de ces animaux extraordinaires.
Au milieu du XIX ème , au moment où Herman MELVILLE écrit "MOBY DICK", les choses sont bien différentes.
Soucieux de rendre un hommage aussi complet que possible à l'animal qui l'obsède, MELVILLE consacre deux chapitres entiers aux diverses représentations de la baleine : gravures, peintures, sculptures sur bois ou ivoire et même montagnes et étoiles qui portent son nom.
S'il est généralement peu tendre avec les artistes ou scientifiques qui se sont frottés au sujet, l'un d'eux pourtant trouve grâce à ses yeux, un français, Ambroise Louis GARNERAY, dont il a admiré deux tableaux, reproduits en aquatinte.
"Elles représentent respectivement des attaques de Cachalot et de la Vraie-Baleine.
Dans la première, un noble cachalot est dépeint dans la pleine majesté de la puissance ; il vient de remonter des profondeurs de l'Océan, juste dessous une baleinière, et porte sur son dos, haut dans l'air, l'affreuse épave démantelée...
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"Pêche du Cachalot" -New-Bedford Whaling Muséum- New-Bedford Mass-USA
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Debout sur cette proue, pour cet insaisissable éclair de temps, on voit un rameur, mi-voilé par le jet furieux de la baleine et s'apprêtant à sauter comme dans un précipice. La scène est merveilleusement juste et vraie."
"Dans la seconde gravure, le canot est en train d'accoster le flanc d'une grande Vraie-Baleine en mouvement et qui roule sa masse noire pleines de mauvaises herbes marines, comme quelque éboulement de rocher couvert de mousse des falaises patagoniennes...
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"Pêche de la baleine" -New-Bedford Whaling Muséum- New-Bedford Mass-USA |
Ainsi au premier-plan tout est rage et mouvement. Mais à l'arrière-plan, par un contraste artistique admirable, est représenté le niveau vitreux d'une mer encalminée ; du vaisseau impuissant, les voiles dégonflées sont affaissées et la masse inerte d'une baleine morte, forteresse conquise, a le drapeau de capture qui tombe paresseusement du bâton fixé dans le trou de son jet."
"Qui était Garneray le peintre ?Je ne sais. Mais je gagerais ma vie qu'il avait pratiqué son sujet, ou alors qu'il avait été merveilleusement formé par quelques baleiniers expérimenté."
Herman Melville avait raison. Ambroise Louis GARNERAY savait e quoi il parlait !
Né en 1783, à Paris, il s'engage à l'âge de 13 ans dans la Marine.
"Excepté la piraterie, je crois que j'ai pratiqué tous les genres de navigation"
Navigant tout aussi bien sur des vaisseaux de guerre officiels, qu'avec Surcouf, sur des bateaux corsaires, il ne quitte la mer qu'en 1806, quand, blessé, il est fait prisonnier par les anglais, qui le garderont "les huit années suivantes dans l'enfer des pontons en rade de Plymouth".
Formé enfant par son père, il utilise ce temps à peindre, puis, libéré devient rapidement peintre officiel de la Marine puis Directeur du musée de Rouen.
Parallèlement il écrit des récits et ses mémoires, qui font de lui "un des précurseurs du roman d'aventure maritime", qui remaniés et édulcorés, seront ensuite publiés dans des éditions pour la jeunesse.
Il meut à Paris en 1857.
Ainsi, d'un livre à d'autres, si nous le voulons, nous ne quitterons pas la mer !