mardi 13 mars 2018

MARY SOMMERVILLE





Autoportrait de Mary Sommerville
Sommerville Collège. Oxford. Grande-Bretagne


Pas de compte-rendu de lecture aujourd'hui, mais un article "perroquet", qui ne fait que remettre en forme ce que j'ai lu ici, mais qui, je l'espère, vous fera découvrir une femme d'exception, comme cela a été le cas pour moi.
C'est Humboldt qui m'a mis sur la piste, pour avoir dîné avec elle lors d'un séjour qu'il fit à Londres en 1827.

Mary Sommerville, est née le 26 décembre 1780 à Jedburgh, en Ecosse.
Fille du vice-amiral William George Fairfax, elle passe son enfance à Burntilsland, dans un état de "pauvreté distinguée" et reçoit tout d'abord une éducation si sommaire, que son père la considère alors qu'elle a dix ans, comme "une sauvage".
Envoyée durant une année dans la pension huppée de Musselburgh, elle n'y apprend que des rudiments d'écriture, de grammaire anglaise et française ainsi que les bases du calcul.
A son retour, elle profite des moments où elle n'est pas occupée par ses devoirs de fille - apprendre la couture, broder sur un abécédaire, s'initier aux bonnes manières, danser - pour lire Shakespeare dans la bibliothèque de son père et poursuit ainsi son éducation de manière assez chaotique, alternant enseignement pour quelques mois dans des institutions, leçons à domicile données par le maître d'école du village, participation plus ou moins clandestine aux cours de mathématiques du précepteur de son frère, apprentissage du grec et du latin chez ses oncles, rencontres formatrices... toutes occasions bonnes à saisir, sans parler du travail personnel dans lequel elle s'abîme dès que cela lui est possible.

En 1804, elle épouse un lointain cousin, le capitaine Samuel Greig, consul de Russie à Londres où elle s'installe. Elle n'y est pas heureuse car son mari, sans pourtant la brimer,  partage largement les préjugés de l'époque contre les femmes instruites.
Mais en 1807, celui-ci décède. Elle retourne en Ecosse avec ses deux enfants  et se remet d'autant mieux à l'étude, notamment des mathématiques, que son héritage lui permet maintenant de le faire sans contraintes.

En 1812, elle se remarie avec son cousin, le docteur William Sommerville, qui contrairement à son premier mari, l'encourage et l'aide à aborder les sciences physiques. Elle étudie ou approfondit ainsi les mathématiques, l'astronomie, la physique, la chimie, la microscopie, le magnétisme, la géographie, la botanique, la géologie... 
Ils ont quatre enfants et mènent une existence riche en voyages et rencontres, qui lui permet d'entrer en relation avec  les écrivains, les artistes , les scientifiques les plus brillants de son temps, comme ce fut le cas notamment pour Turner et  Humboldt.
Installée avec sa famille à Chelsea elle devient  le professeur de mathématiques d'Ada Byron, plus connue sous le nom de Lovelace, aujourd'hui considérée comme une pionnière de la science informatique.

En 1826, elle publie un premier article : "Les propriétés magnétiques des rayons ultraviolets sur le spectre solaire", bientôt suivi en 1831 par "The mechanism of the heavens", traduction dans tous les sens du terme, de l'oeuvre de Pierre-Simon Laplace  "La mécanique Céleste".
C'est ce premier ouvrage qui la rend célèbre :

"J'ai traduit l'oeuvre de Laplace de l'algèbre au langage commun"

dit-elle et c'est ce style simple, net et précis, qui sera à l'origine de sa popularité.

Elle publie ensuite d'autres ouvrages de son cru :

- "On the connexion of the physical Sciences" (1834), dans lequel elle plaide pour l'interdisciplinarité et qui lui vaut d'entrer à la "Société Royale d'Astronomie" en même temps que Caroline Herschel.

- "Physical Geography" , (1848), qui "présente de grandes affinités avec la vision humboldtienne des sciences et du monde naturel" (A.Wulf), avec lequel elle remporte la médaille Victoria de la Société Royale de Géographie.

- "Molecular and Microscopic Science" (1869), qui lui demande dix ans d'efforts.

Dans la sixième édition de "On connexion of Physical Sciences", elle pose de l'existence d' une planète perturbant Uranus,  ce qui amène John Couch Adams  à chercher et découvrir Neptune.



Neptune
Source : Nasa.gov


En 1838,  elle s'installe en Italie avec son mari. Ils y passeront le plus clair de leur temps jusqu'à leurs morts, tout en continuant à correspondre avec l'élite scientifique de leur temps.

Quatre année avant sa mort elle signe, sans succès, la pétition de John Stuart Mill en faveur du suffrage des femmes.

Elle meurt  le 28 novembre 1872 à Naples, où elle repose dans le cimetière anglais.

L'année suivante paraît son autobiographie "Personnal recollections", dont l'intérêt repose autant sur ce qu'elle révèle de son caractère, que pour l'aperçu qu'elle donne des milieux littéraires et scientifiques de son époque.

C'est ainsi que celle qu'on appelait "La rose de Jedburgh" dans sa jeunesse, en référence à ses manières douces et polies,  est devenue  "la Reine de la Science"

Aujourd'hui, le "Collège Sommerville" à Oxford, un établissement supérieur à Brisbane, une salle du parlement d'Edimbourg, une île,  un astéroïde -le 5771 Sommerville-,  un cratère lunaire, un billet de la banque d'Ecosse, portent son nom ou son effigie et témoignent encore de sa remarquable carrière.


15 commentaires:

  1. "Reine de la science", voilà une elle appellation pour cette dame douce et polie qui dut, à l'époque, se heurter au machisme dans le domaine scientifique (entre autres). En ce temps, les propos sexistes n'entraînaient pas la démission (je songe au Nobel de médecine Thimoty Hunt).

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  2. .... et dans un sens heureusement pour ses messieurs car cela aurait frisé l'hécatombe ! Par chance il y avait également des hommes comme le Dr Sommerville et des femmes si brillantes, qu'il était difficile de les éclipser. Bonne journée Christian.

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  3. Cet article m'intéresse et je reviendrai le lire quand j'aurai un peu plus de temps. Merci de titiller ma curiosité, j'adore ça.

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  4. Alors c'est parfait ! Bonne lecture différée !

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  5. Quelle bonne idée de nous faire connaître cette scientifique capable aussi de peindre son autoportrait ! Dans son cas, le veuvage a eu du bon, et surtout le remariage avec un homme qui la soutenait dans son désir d'approfondir et d'élargir ses connaissances. Bravo, Mrs Sommerville.

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    1. Oui, bravo à elle car les conditions dans lesquels elle a fait ses études ne sont pas simples : parents et premier mari réticents, six enfants à élever, une maison "à tenir" et des moyens financiers limités... Je suis pleine d'admiration !

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  6. Une belle personnalité ! Finalement, en grattant un peu, on en trouve des femmes remarquables qui n'ont jamais été mises en avant.

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    1. Oui, c'est d'ailleurs incroyable. J'ai été tout autant étonnée que le premier programmateur informatique était en fait une programmatrice, cette fameuse Ada Lovelace, fille de Byron, qui l'abandonnât avec sa mère, lorsqu'elle était enfant. On continue à l'encenser qui la connaît ?

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    2. Et la femme d'Einstein qui travaillait avec lui et aurait mérité, paraît-il, de partager le prix Nobel avec lui !

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  7. j'aime énormément ce genre de billet
    je vois que comme moi tu suis les miettes de pain que nous laissent les auteurs dans leurs livres
    j'appelle cela lire par ricochet et j'adore ça
    Voilà un personnage qui prend toute ça place dans une journée des femmes

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  8. J'en suis ravie Dominique. J'aime beaucoup moi aussi prolonger ainsi mes lectures. Oui, elle mériterait d'être plus connue comme Ada Lovelace. Il ne serait pas inutile d'en parler dans les lycées et pourquoi pas un livre rassemblant toutes ces femmes de génie mais restées pratiquement inconnues, dans l'esprit des "Etoiles Noires" de Lilian Thuram ?

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  9. Quelle femme extraordinaire ! Et surtout à son époque avoir pu être reconnue dans ce monde fait pour les hommes, c'est encore plus étonnant ! tu en parles très bien ! Ton billet me donne envie de la connaître.

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    1. Oui, j'ai été moi-même très surprise en faisant mes petites recherches. Quant à la femme d'Einstein, je ne savais même pas qu'elle existait. Il reste du travail à faire !
      Bon dimanche, Claudialucia.

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  10. Quel destin ! Quelle combativité surtout. Merci de m'avoir fait connaître cette femme extraordinaire.
    Bon dimanche.

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  11. Cela a été un plaisir ! Bon dimanche à toi !

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