Titre original : "The stranger in the woods"
Auteur : Michael FINKEL
Traducteur : Johan-Frederik Hel Guegj
Traducteur : Johan-Frederik Hel Guegj
Editions : JC Lattès. 2017. 272 pages
De 1987 à 2014, soit durant 27 ans, le camp d'été pour enfants souffrant de handicaps de Pine Tree et les trois-cents bungalows qui s'échelonnent le long des vingt-trois kilomètres qui délimitent l'Etang du Nord et le Petit Etang du Nord, non loin du village d'Albion dans le Maine, furent la cible de multiples vols aux caractéristiques similaires : des vols "propres", pas du vandalisme, des objets ciblés : vivres surtout sous emballage, matériel de camping, vêtements pour homme, piles, livres et revues, très peu d'argent...
Le voleur était si prévisible que bientôt chacun sut qu'il était "un bec sucré", préférait un certain type de bière à un autre et les slips aux caleçons.
On invoquât d'abord une bande d'adolescents, puis petit à petit, le Maine ayant toujours été "une terre d'excentricité", se construisit la légende de l'ermite.
North Pond et Little North Pond
Source :daysrealstate.com
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Mais tout lasse.
En 2004 , la plupart des bungalows ayant été visités, aucune trace ne permettant de suivre une quelconque piste, les battues au milieu des bois et des amas de rochers qui forment l'environnement des étangs étant restées infructueuses, une caméra à détecteur de mouvement fut installée par l'un des propriétaires. Elle permit enfin d'apercevoir le responsable de tous ces troubles : un homme vêtu proprement "ni émacié, ni barbu", pas particulièrement "agile ou robuste" : rien d'un homme des bois, non, un "Monsieur Ordinaire", dont, malheureusement le visage restait flou.
Ce n'est que dix ans plus tard, qu'un un garde-chasse amateur de technologie de pointe réussit à le piéger :
Christopher KNIGHT, 49 ans, cinquième enfant d'une famille de"gens de la campagne" du tout proche village d'Albion, brusquement disparu à l'âge de 22 ans, sans que rien ne puisse l'expliquer. Juste un garçon silencieux et timide, "mais pas du tout bizarre".
Cette découverte entraîna un énorme tapage médiatique dans tous le pays.
Seul, Michael FINKEL, journaliste dans le Montana, réussit à entrer en contact avec lui, en lui adressant une lettre respectueuse, dans laquelle il évoquait son goût pour la nature et la littérature. Une semaine plus tard, il recevait une courte réponse rédigée au dos d'une photo d'un vieil homme, qui avait toujours vécu dans la brousse. Une correspondance espacée suivit ainsi que quelques rencontres durant l'incarcération de KNIGHT, puis après sa sortie de prison.
Le camp de Christopher KNIGHT
Source : mainepublic.org
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C'est à partir de ce matériau, enrichi par la visite de l'extraordinaire "camp" que Christopher KNIGHT avait établi peu à peu, que Michael FINKEL a écrit cet ouvrage.
Il y dresse le portrait (est-ce d'ailleurs possible ?) de cet homme, qui a choisi de vivre la vie dont il avait besoin : rêver, "penser à tout ce qui [lui ]passait par la tête", "observer la nature", lire, écouter parfois la radio, survivre aussi, tache épuisante dans cet environnement, être seul (27 ans), en affirmant cependant ne jamais l'avoir été. Vivre.
Son seul regret, ou plutôt sa honte : avoir volé, seule façon pour lui de pouvoir échapper "au contact des autres", qui "le soumettait à un état de tension permanent".
Son seul regret, ou plutôt sa honte : avoir volé, seule façon pour lui de pouvoir échapper "au contact des autres", qui "le soumettait à un état de tension permanent".
J'ai beaucoup aimé ce livre, histoire d'une rencontre, aussi courte fut-elle, entre deux hommes, capables de pleurer ensemble.
J'aimerais apprendre un jour que Christopher KNIGHT a pris à nouveau une route, que tout le monde ignore et que surtout que personne ne souhaite connaître.
C'est un beau sujet qui me plairait à priori.
RépondreSupprimerJ'ai pensé à votre article sur "Dans les forêts de Sibérie" de Sylvain Tesson, en lisant ce livre qui me semble en être une antithèse. Je pense que le sujet vous plairait en effet, tant la démarche et sa réalisation sont aussi sincères que fascinantes.
SupprimerD'après ta réponse et par rapport à Sylvain Tesson, il s'agit d'une démarche plus authentique et même dans le cas de cet homme de quelque chose de vital. J'ai noté le titre.
SupprimerUne histoire très originale ; je le note.
RépondreSupprimerJe crois que c'est une histoire unique. Je l'ai trouvée profondément émouvante. Bon week-end !
SupprimerOh, un sujet qui me parle beaucoup: je sors, enchantée (tu sais, ces livres qu'on n'a pas envie de terminer) du roman "Dans la forêt", ce sera une magnifique prolongation. Merci!
RépondreSupprimerD'une certaine façon ce livre est bien la suite de "Dans la Forêt", sur ce qui se passe quand on a tout quitté. Par contre il ne s'agit pas ici de littérature, mais du récit d'une enquête, donc ce n'est pas le même style ! Mais je trouve que c'est un beau livre.
Supprimerle sujet est magnifique, je me souviens d'avoir entendu dans une émission de télé évoquer ce personnages mais je n'en savais rien de plus
RépondreSupprimerje vais noter ce titre et pousser la bibliothèque à l'acheter
J'espère que ce sera possible. Sinon, n'hésite pas, je t'adresserai mon exemplaire. Ce sera avec grand plaisir. Bon week-end, Dominique.
RépondreSupprimerQuelle histoire ! C'est si troublant, un être humain que le contact des autres met "dans un état de tension permanent" tel qu'il s'en isole complètement. Je note.
RépondreSupprimerOui, c'est en effet très troublant.. Cela peut arriver à chacun par périodes plus ou moins longues, mais 27 ans...
RépondreSupprimerUn homme qui n'aurait prononcé qu'un seul mot en 27 ans. Vivre en silence ne me dérangerait (peut-être) pas, il y tant de paroles sottes.
RépondreSupprimerJe trouve cette phrase dans l'article de l'express : "pourquoi les hommes devraient-ils forcément vivre de manière sociable en communauté ? ". Oui après tout, pourquoi.