Titre original : "Yasashi Ogawa " -1996-
Auteure : YÔKO OGAWA
Traduction : Rose -Marie MAKINO-FAYOLLE et Yukari KOMETANI
Editions : Actes Sud -2010- 241 pages.
Il y a des couvertures de livres auxquelles je suis incapable de résister. Et de toute façon comment pouvoir le faire, lorsqu'elle s'accompagne d'un titre si doux, évocateur, d'une musique si raffinée et si touchante ?
Nous sommes au Japon, d'abord à Tokyo, puis dans la montagne où Ruriko, vient brusquement s'établir dans le chalet de vacances de son enfance. Elle y fait très vite la connaissance de ses voisins, Nitta et Kaoru et du vieux chien de cette dernière.
Tous trois partagent la pratique de métiers rares et artistiques, calligraphie pour Ruriko, lutherie pour Nitta et Kaoru qui est son apprentie.
Au fil des jours et des rencontres, promenades, repas, chargés d'un mélange troublant de chaleur et de respect, ils comprennent à demi-mots que chacun est venu ici pour oublier une douleur intime qui marque encore leur vie. Pas de grands mots, pas de pleurs bruyants non plus, juste quelques paroles, quelques gestes, quelques regards.
Une année va passer, des liens tenus vont se tisser, Ruriko, troublée, cherche sa place.
Certains poursuivront leur vie, d'autres se retrouveront à devoir la construire dans une solitude encore beaucoup plus radicale qu'avant.
Bien que ce livre soit chargé de passion, pour un autre que soi ou pour la musique, le sentiment qui m'a dominée en le lisant est celui de sérénité, triste souvent, mais sérénité tout de même.
Tout y concourt : la nature très présente, les activités des protagonistes avec tout ce qu'elles demandent, concentration, habileté, sensibilité, la musique évoquée, écoutée, jouée, le calme qui met du baume sur les blessures des uns et des autres.
Pourtant il y a aussi ce troublant contraste entre l'extrême civilité, toute orientale, montrée par chacun, qui suppose une maîtrise de soi digne des héros de Jane Austen et la violence des comportements et des sentiments, qui fait régner de manière souterraine, une tension qui irrigue également tout le livre.
Alors que tout ici respire la sensibilité des êtres, j'ai pensé aux "Vestiges du jour" de Kazuo ISHIGURO, d'origine japonaise lui-aussi et comme à la lecture de ce dernier, j'ai été touchée au plus profond.