vendredi 11 mars 2011

LE COCHON : HISTOIRE D'UN COUSIN MAL-AIME



Auteur : Michel Pastoureau
Edition : Gallimard - Découvertes- 2009
Format : Poche -158 pages-


Si vous vous appelez Eberhard Pourcel et que vous habitez à Porquerolles, vous avez déjà trois bonnes raisons de lire ce livre : votre prénom, votre nom et  celui de votre village, font tous référence au sanglier ou au cochon.
Si ce n'est pas le cas, ce qui est le plus probable, n'hésitez pas non plus, car vous allez découvrir beaucoup de choses sur ce cousin biologique aimé ou méprisé qui nous accompagne depuis vingt-huit millénaires.

C'est d'abord d'histoire qu'il est question dans les deux premiers chapitres. Une histoire au long cours, qui nous fait passer du porc sauvage - qui ne serait pas le sanglier - aux cochons domestiques, heureux "Cul noir du Limousin, Gascon, Pie noir basque ou Corse", qui ont encore parfois la chance de s'ébattre au grand-air, ou malheureux  "Large White" et autres "Berkshire", parqués dans leurs porcheries industrielles et qui mourront sans jamais avoir vu le jour.
Nous suivons donc notre animal, qui n'a pas toujours été rose, du VIII ème millénaire avant notre ère, où l'homme, se sédentarisant peut le domestiquer, au monde antique (Egypte, Grèce, Rome) où il est élevé en troupeaux pour être sacrifié aux Dieux comme aux humains.
Source : Bréviaire d'amour d'Ermengal de Béziers

Nous le retrouvons ensuite au Moyen-Âge : bien que méprisé - le porcher est souvent un "simple d'esprit" -, il reste le pilier de l'alimentation carnée, puisque sa viande peut aussi bien être mangée fraîche, après l'abattage, que salée, longtemps après celui-ci.
Il vit alors parqué près des fermes, mais est aussi élevé en forêt, quand on ne le retrouve pas en pleine ville, où, gambadant, il ne manque pas de provoquer des accidents, comme celui qui coûtera la vie au fils aîné du roi Louis VI Le Gros, à Paris en 1133.
Ce n'est qu'à partir de 1740 qu'il gagnera en Grande-Bretagne la porcherie,  à l'occasion des premières tentatives d'amélioration des races porcines, et au XIX ème siecle que se développera son élevage intensif puis industriel, en lien avec la diffusion de la pomme de terre et le développement des industries agro-alimentaires pourvoyeuses de déchets dont on le nourrira.

Mais après l'histoire vient la symbolique : comme pour tout autre animal, elle est ambivalente, variant selon les contextes, mais globalement elle reste plus négative que positive, les tabous des religions monothéistes l'emportant sur les vertus que lui reconnaissaient, les celtes, les germains ou encore les romains.
D'un côté le cochon est jugé impur, se nourrissant d'ordures quand ce n'est pas pire et se vautrant dans la boue. Il l'est à tel point que les hébreux refusent non seulement de le manger mais aussi de le toucher, d'utiliser son cuir, et même de le nommer. Il est "une autre chose".
L'Islam rejette également sa chair et "tous les produits que l'on peut en retirer", et les théologiens chrétiens du Moyen-Âge, pour ne pas être en reste, en font radicalement l'un "des attributs de Satan.". Cependant, "pour les  chrétiens, il existe un bon porc : le cochon compagnon et attribut de saints" .









Le hasard faisant bien les choses, j'ai découvert ce week-end dans l'église Saint-Vincent à Nyons, ce portrait de Saint-Antoine .....et  de son cochon.





De l'autre côté, et pour équilibrer ce sombre portrait, on  lui trouve également quelques qualités, ou plutôt, les reconnaît-on surtout au sanglier et à la truie. Au premier,  Celtes et Germains accordent la force et le courage absolu. C'est pourquoi il figure sur les blasons.
Source : Wikimedia

A la seconde, la fécondité,
Source : l'élevage respectueux
Sans oublier "le petit cochon" qui doit permettre à tous d'accéder à la prospérité !

Source : Sidonie et Gédéon

Enfin, pour conclure, Michel Pastoureau aborde l'aspect le plus fascinant de cette histoire, ce qui pourrait expliquer, plus que toute autre chose l'attrait et le dégoût que le cochon  inspire : notre cousinage biologique, source de légendes, de caricatures, de pratiques et d'histoires.

Source : Wikimedia

On peut se remettre à lire !


Ce que j'ai aimé :
Comme toujours, dans cette collection :
 - le mariage texte/iconographie, toujours splendide !
-  les "Témoignages et documents" , en fin d'ouvrage, qui permettent d'approfondir l'un ou l'autre aspect de l'analyse, ou de découvrir les dates et les lieux des événements, qui maintiennent toujours vivantes les traditions porcines.
- la possibilité de lire l'ouvrage à différents niveaux : de la première à la dernière lettre, ou en survolant au  fil des commentaires qui accompagnent chaque illustration.
Ce que j'ai moins apprécié très contradictoirement :
Comme toujours dans cette collection :
- La difficulté que j'ai à lire le texte au milieu de toutes ces images !

1 commentaire:

  1. Annie -- I am reading your latest two posts backwards. Now I see the reason for the title of your later post "Always the Pig".

    This book actually sounds very interesting and my husband will love your pictures and text. As a boy, he raised pigs on the family acreage.

    We have quite an amazing history with this animal. Thank you for sharing.

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